NOS ILLUSTRES ANCIENS

LE GÉNÉRAL ROLLET
UN HOMME DE COEUR, DE CARACTÈRE ET D'IDÉAL

12 - La consécration (suite et fin)

"Une tournée d'essai de nouveaux véhicules automobiles s'achevait au Sahara, après plusieurs étapes éreintantes. Je faisais équipage avec le Général Rollet – heureux d'avoir retrouvé l'odeur du bled – le haut fonctionnaire, assez fatigué qui représentait le gouverneur et un conducteur. Le convoi avait pris plusieurs heures d'avance sur notre véhicule quand nous tombâmes en panne. Chacun mis la main à la réparation. Avant de repartir, le général estima que nous avions bien mérité un café. Misère ! Dans la caisse-popote il ne m'en restait pratiquement plus et les petites cuillers étaient parties avec le convoi ! Dans mes petits souliers, je servis donc quatre tasses d'une décoction bien claire et mal sucrée. Notre accompagnateur d'Alger fit la grimace mais le général prit fort bien la chose : trempant un index encore noir de cambouis dans le verre du pékin, il le rassura : "Allez ! Ca remue le sucre et ça donne du goût et de la couleur ! Buvez !"."

On comprend que cette démoniaque simplicité ait enchanté les légionnaires et il n'est pas interdit de penser que Rollet, bien que sans calcul, ne fit aucun effort même parvenu à la célébrité pour affiner son image, se satisfaisant d'être et de demeurer semblables à ses hommes. Cette célébrité lui amenait parfois des distractions inattendues comme cette lettre écrite par un notaire de Melun qui demandait au général, reconnu sur une photo de presse, où il devait lui expédier une couverture, un dolman, une chemise et un col oubliés chez lui au cours d'un bivouac en… 1914.

En 1933, estimant que l'existence d'une "inspection Légion" ne devait pas être prolongée, le gouvernement français la supprime malgré le tollé des gens d'expérience. Le Général Rollet, quoique certainement peiné de ce recul, affecte de ne pas s'en soucier. Il ne marque aucun ralentissement dans ses visites à travers les régiments ni dans l'envoi de ses recommandations à leurs chefs.

Mieux même, sachant que la retraite est proche, il projette d'aller inspecter ses légionnaires les plus lointains, ceux d'Indochine. La mesure réglementaire qui le place dans la deuxième section du cadre de l'état-major peut bien prendre effet le 20 décembre 1935, le jour même de ses soixante ans ! Il n'en partira pas moins en septembre 1936, à bord du Son-Tay, pour rejoindre, le temps de quelques semaines, le 5ème R.E.I. à Ha-Giang, au Tonkin, heureux d'apporter cette marque d'affection à ces exilés et aussi de leur faire comprendre qu'ils appartiennent tous, eux comme lui, à la même Légion, diverse mais une.

Suite

Le 5ème R.E.I. au Tonkin
Le monument aux Morts de Tong
La fanfare du 5ème R.E.I. en place pour l'ouverture d'une cérémonie.