L'HISTOIRE DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE
1914-1918
Récit du fait d’arme de l’Adjudant-chef Mader (suite)
Tandis que les deux chefs observaient en silence, un guetteur (Bengerter, 1ère classe) attire leur attention sur un mouvement insolite dans le fond du vallon. En effet, une compagnie du 168ème, venant de l’Ouest, cherche à s’y infiltrer. Elle ignore sans doute la présence à cet endroit de l’ennemi qui, déjà, a remarqué son avance. D’un petit fortin qui commande le boyau de liaison, il s’apprête à la recevoir à coups de grenades.
Ce faisant, il tourne le dos à la crête où se tiennent les observateurs de la Légion qui ne peuvent tirer dans la tranchée sans atteindre l’ami en même temps que l’ennemi. Encore quelques minutes et les bleus-horizons «tomberont dans le piège». Mais Mader, en vieux limier des champs de bataille, a flairé le danger et d’un coup d’œil il débrouille toute la situation.
Se mettre d’accord avec son commandant de compagnie, rassembler en hâte quelque dix légionnaires de surveillance dans la tranchée, ramasser quelques grenades, bondir dans le boyau de liaison suivi de ces hommes électrisés, c’est l’affaire d’une minute. Le petit groupe court si vite que les mitrailleuses ennemies ne peuvent ouvrir le feu avant qu’ils soient dans l’angle mort, à l’abri des balles.
La tête de la compagnie du 168ème n’est plus qu’à quelques mètres du fortin ; déjà les Allemands lèvent les bras pour lancer leurs grenades, lorsque soudain, maigre et nerveuse, la grande silhouette de Mader bondissant dans leur dos, surgit au milieu d’eux.