LES RÉCITS DES ANCIENS

LA GUERRE D'INDOCHINE

CORRESPONDANCE DU LIEUTENANT TOURRET

LETTRES MAROCAINES
au 2ème R.E.C. (1ère Partie)

Après 15 mois passés au 1er Régiment de Spahis en Algérie en 1951-52 et 3 mois de stage pour apprendre le vietnamien je suis muté au 2ème Régiment Etranger de Cavalerie au Maroc pour prendre un "vernis" de Légion, en attendant de partir un mois plus tard en Indochine au 1er R.E.C. J’y commande un peloton de jeunes engagés à l’instruction.

Oujda [Maroc] Dimanche 22 février 1953

Par quoi commencer ?

Tout d’abord mon travail : un peloton de cinquante types, comme je vous l’ai dit déjà. 34 allemands, en général Silésie, Saxe ou Berlin-Est ; 3 Sarrois ; 1 Hollandais, 1 Yougoslave, 1 Espagnol, 4 Italiens, 1 Suisse, 1 Belge, 4 Français. Là-dessus, 1/4 parle le français, 1/4 un peu (un tout petit peu) et le reste pas du tout. Ce qui fait que tout se transmet, d’abord en français, puis à coups de pied dans le c… et enfin en allemand (à noter qu’après le "2" les 4/5ème ont compris de quoi il s’agit). Cela fait entrer plus vite le français que de traduire tout de suite car sans ça, les types s’en foutent et attendent la traduction.

Discipline de fer où tout se fait par rassemblements, commandements réglementaires (même pour faire cinq mètres), claquements de talons et garde-à-vous cadavériques. A la moindre incartade, une bonne séance de ramper et pas de gymnastique remet les choses au point ! Et cette incartade au 1er Spahis [mon régiment d’avant] serait considérée comme un très bon mouvement ou un relâchement très acceptable.

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