LES RÉCITS DES ANCIENS
LA GUERRE D'ALGÉRIE
RIEN NE POURRA EFFACER DE ME MÉMOIRE CE 5 JUILLET 1956 (suite et fin)
Le silence est revenu et seules quelques rares détonations claquent, marquant, nous le comprenons, qu'un drame vient de se jouer, qu'il sera trop tard pour en limiter l'atroce réalité.
Pris à partie aux abords du douar, lieu de l'embuscade, nous disputons le terrain avec des éléments retardateurs Fells, qui y laisseront quelques uns des leurs afin de permettre au gros de leur troupe de s'enfuir dans la profonde montagne du Djebel Babar qui culmine à 2004 mètres et du Djebel Tamentoube, où sillonne l'Oued Kébia aux crevasses profondes et sinistres.
Et nous arrivons sur les lieux … enfin nous réalisons la liaison avec, ce qui fut la Section Hervieux.
Quelle tristesse, quelle désolation … Toute la Section est là, décimée, égorgée, émasculée, une grande partie des légionnaires sont nus … c'est une vision dantesque ! Deux survivants miraculés, hagards, bouleversés, dont l'un décèdera subitement le lendemain et l'autre, "c'est le destin" sera tué dans un accident d'hélicoptère un mois après !
Toute une section
est là, touchée à mort. Quel carnage, Quelle
rage destructive, quel déchainement bestial de ne pas se suffire
de la mort d'un homme mais en plus d'y ajouter la marque de l'"infamie"
de la barbarie ! … Gradés et légionnaires sont
là, figés à jamais. C'est un désastre.
Certes ces soldats se sont battus avec courage, il suffit de constater
les tas de douilles partout disséminées et plusieurs
corps de Fells et du matériel abandonné.
Le Lieutenant Huguenin est arrivé comme nous, trop tard …
Comme nous il ne pu que constater les terribles dégâts
…
Dans la dignité, ensemble nous avons récupérés les corps de ces vaillants soldats qui reçurent tous, quelques jours après, les honneurs militaires de l'ensemble du 2ème Bataillon de la 13ème D.B.L.E.
Je n'oublierai jamais cette journée du 5 juillet 1956.
Lieutenant-colonel
(h) Robert TAURAND
Commandeur de la Légion d'Honneur