LES FAITS D'ARMES DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

COMMEMORATION DU 50ème ANNIVERSAIRE DES COMBATS DE LA R.C. 4

I / HOMELIE DU PERE CASTA
Ancien aumônier parachutiste en Indochine

Nous voici donc réunis, le cœur un peu lourd, en cette église Saint-Louis des Invalides, citadelle pacifique des gloires et des deuils de nos armées, pour faire mémoire de tous ceux qui ont vécu les terribles semaines de septembre-octobre 1950, sur la R.C. 4 : 6.500 hommes engagés, dont 1.500 seulement ont pu échapper à la mort ou à la captivité. Un demi-siècle de notre histoire !

En priorité, je m'adresse aux familles éprouvées de nos morts, puis aux survivants qui ont eu cette initiative. J'ai répondu à leur invitation, avec émotion et reconnaissance, pour l'exemple qu'ils entendent donner de cette guerre oubliée. Oubliée, peut-être, mais par expérience nous savons que souffrir passe, mais avoir souffert demeure. «Paix aux hommes de guerre», ainsi priait Péguy. C'est donc dans cet esprit que cette célébration devient invitation à mettre de l'ordre dans nos souvenirs, afin d'y apporter un supplément d'âme et, ainsi que le conseillait Saint-Augustin, effectuer «une plongée en soi-même pour savoir ce que l'on est par rapport à son passé.»

Plonger en soi-même est un devoir de mémoire envers ceux qui ne sont plus. Et puisque nous y sommes, ne jamais oublier que la mémoire est une des sept colonnes de l'héroïsme. Que restent gravés dans nos mémoires les noms de tous ceux qui, dans des combats au corps à corps d'une rare violence, sont tombés les armes à la main ou désarmés, sont morts dans la misère et l'oubli des camps Viêt-minh. Pendant les huit années de guerre, sur 36.000 de nos camarades faits prisonniers, 26.000 sont morts en captivité, soir les deux-tiers : taux de mortalité très supérieur à celui des camps nazis.

Ce devoir ne doit pas s'arrêter à une sélection, ni à une simple déclaration de principe, mais il s'impose à notre vigilance. Nous avons encore un rôle à jouer pour continuer à défendre les valeurs pour la défense desquelles nous avons combattu. Aussi convient-il de chasser de notre être intérieur tout ce qui est agitation stérile de l'esprit avec ses rancunes, ses colères et ses jalousies. La légitime frustration que nous éprouvons de cette guerre oubliée, ne fait-elle pas de nous des soldats oubliés, déshérités du patrimoine de bravoure et de dévouement, au sein même de notre patrie. On voudrait tant faire de nos soldats des êtres muets et honteux. La honte n'est pas dans nos rangs, mais bien son contraire, l'Honneur !

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