LES RÉCITS DES ANCIENS

LES ANNÉES QUATRE-VINGT

LE COUP DE LA BOMBARDE (suite)

Août 1986. En Limousin, près de Rochechouart, petite localité, sous-préfecture de la Haute-Vienne, à Videix, dans un cadre de verdure reposant, entouré de châtaigniers et de bruyères, sous un soleil dardant de ses chauds rayons bienfaisants une nature paisible et accueillante, va se dérouler le Bol d'Or des amateurs. L'ambiance est bon enfant, le public est là, venu curieux, sympathique, intéressé, toujours avide d'émotions fortes.

- "Mon Colonel, vous et Monsieur Verdier, Fondé de Pouvoir du Tour de France, votre ami, faites-nous l'honneur de donner le départ de la course."
- "Pas de problème, nous avons l'habitude !"

Le décor est en place. Un peloton de cinquante coureurs aux maillots bariolés, bien rangé, occupe la largeur de la route. Un ruban tricolore est placé sur la ligne de départ. Il sera coupé par Monsieur le Maire le moment venu. Sur la gauche de la route, un podium avec quarante personnalités et invités. Un speaker meuble le temps par des annonces, des présentations et passe un peu de musique adaptée. Canalisé par des barrières sur quatre-vingt mètres, le public est là à attendre la libération du peloton des coureurs. A dix mètres au niveau du départ, à l'intérieur d'un taillis de châtaigniers, est placée une "bombarde" datant certainement de la guerre de cent ans, toute rouillée, inquiétante par son aspect insolite. Elle est bourrée de papier, de poudre noire jusqu'à la gueule. De son cul bombé, sort une minable mèche blanche qui semble attendre le "feu" pour mourir ! Feu libérateur pour pousser son râle !

Monsieur le maire coupe le ruban. Le directeur de l'épreuve nous fait signe. C'est le moment fatidique… la mèche est allumée. Debout, nous attendons, le sort en est jeté, ça va péter ! Rien ne vient. Monsieur Verdier et moi, surpris, nous mettons à genoux et de nos puissants souffles d'hommes de soixante ans, activons la combustion de la mèche rétive.

Suite

Le Lieutenant-colonel Robert Taurand